Intérieur : quatorze jours Huit Nuits

Credit : Amaury Voslion

Cet atelier d'éducation aux images Passeurs d'images a été porté en par Normandie Images. Il s'inscrit dans le cadre du dispositif Culture-Justice pour une partie grace à des ateliers proposés au centre de détention de Val de Reuil Les vignettes.

« Quatorze jours et Huit Nuits » est un projet audiovisuel qui a permis à un groupe de personnes détenues de réaliser un film documentaire à partir de la musique du groupe rouennais Huit Nuits.

Il s’est déroulé durant 16 séances entre le 4 et le 19 décembre 2024.

 

Déroulement

Il a débuté par un concert du groupe dans l'établissement. Le concert a été filmé par m'équipe du Canal vidéo interne de l'établissement.

Les deux séances suivantes ont été des ateliers d’écriture de textes et la récolte de témoignages inspirés par les paroles des chansons Précipices, Sycomore et Fragile.

Les musiques ont été mises en en résonance avec le ressenti des personnes détenues.

En parallèle, les personnes ont pu choisir les lieux de tournage et réfléchir à la mise en scène. Un planning de réalisation a finalement été créé.

Durant les dernières séances l’équipe a enchainé les prises de vue au quartier socio-culturel, au gymnase, dans la salle de boxe, dans le jardin des parloirs, dans la salle de spectacle, dans une des bibliothèques et enfin dans une unité de détention (couloirs d’accès, coursives, une cellule habitée, une cellule inoccupée).

Ils ont également enregistré des voix en synchronisation avec la musique.

Enfin des prises de vue extérieures complémentaires ont été faites par Amaury Voslion à Val de Reuil et à Paris.

Participation

Dès le départ, il a été imaginé que le projet puisse réunir des personnes détenues déjà expérimentées en réalisation vidéo et d’autres novices en la matière. Le projet a donc été proposé en priorité aux auxiliaires du Canal vidéo interne. Un recrutement a été lancé afin de compléter l’équipe. Tris personnes supplémentaires se sont portées volontaires. L’équipe ainsi constituée s’est mise au travail sous la houlette du cinéaste Amaury Voslion.

Valorisation

Un autre volet du projet Quatorze jours Huit nuits s'est déroulé à Rouen avec des adultes migrants accompagnés par France terre d’asile et le réalisateur Michael Leclere. Les personnes migrantes ont réalisé un clip. Ce volet a été financé via l’appel à projet Action culturelle au bénéfice de la langue française.

Les deux films ont été diffusé vendredi 23 février 2024 au cinéma Kinépolis de Rouen.

Pour voir le film c'est par ici !

Amaury Voslion

Passionné de photographie depuis toujours, Amaury Voslion réalise en 1995 son premier court-métrage L’espace d’un instant. Il signe par la suite quatre autres courts. Et de nombreux documentaires, dont Paul Morrissey, la trilogie : Flesh, Trash, Heat, qui remporte en 2003 le Prix Cannes Classique au Festival de Cannes. En 2005, Magnificat Films et TPS lui confient la réalisation de son premier téléfilm, Lumière.
Sa grande maîtrise de l’image et son sens poussé de l’esthétique l’amènent à réaliser clips, films corporate et publicités à l’international et notamment en Chine, pour des clients tels que WWF, McDonalds ou Air France.

En 2011, il réalise la série culte (dixit L’express) « S’il n’en restait qu’une » qui présente 17 portraits documentaires de photographes contemporains. Il poursuit ce travail sur la photographie en réalisant « L’œil et la bouche », sur la photographie culinaire, en collaboration avec Jean-Pierre PJ Stéphan. Il approfondit son exploration du monde culinaire avec « S’il n’en restait qu’une – saison 2 » consacrée à 8 des plus grands chefs cuisiniers français.

Vient de co-réaliser avec le photographe Richard DUMAS le clip du come back du groupe Les Innocents.
Il développe actuellement un documentaire sur la diplomatie culinaire, ainsi qu'un premier long métrage.

Démo fiction : http://www.youtube.com/watch?v=EmGKoxJuLHc

Démo doc : http://www.youtube.com/watch?v=-JtejDT-SkM

Huit nuits

Huit Nuits est un trio rouennais qui propose un savant mélange de poésie, de voix entremêlées, de violoncelle, de guitare et de percussions. Ils sont présents sur la scène normande depuis 2015. Parrainés par la salle musiques actuelles Le 106 et la scène conventionnée chanson française Le Trianon Transatlantique, ils ne cessent de créer. Il est composé de Manon Basille au chant, violoncelle et glockenspiel, Pierrick Le Bras au chant et à la guitare et de Bertrand Geslin à la batterie et au steel-drum.

Chaine youtube : https://www.youtube.com/channel/UCC6gpn4QEqNJedHvOigBfnw

Facbook : http://www.youtube.com/watch?v=-JtejDT-SkM

 

3 questions à Amaury Voslion, réalisateur:

1 /  Comment est né ce projet ?

C’est une proposition d’Anne-Sophie Charpy. Mais à l’origine on m’a proposé de faire un clip et, d’entrée de jeu cette idée ne me convenait pas. Aller tourner dans un centre de détention pour faire « un simple clip » me posait problème. Car je me disais « la parole des détenus est une parole rare ».

Il y avait à mes yeux quelque chose de précieux à pouvoir entrer dans ce lieu et travailler avec ces hommes. J’ai donc proposé à Anne-Sophie de transformer cette proposition de clip en quelque chose de plus hybride (ce qui est le coeur de mon travail personnel), où se mêlerait clip et documentaire, voir performance car il y eut un temps l’idée de fournir une version du film sans la musique pour le groupe la joue en live sur scène avec les voix qui habitent le film, mais cette option à été abandonnée.

L’atelier vidéo s’est donc ouvert en atelier d’écriture.

J’ai proposé aux quatre participants de s’approprier les textes des chansons, de les « pirater » en y apposant leurs mots. Les morceaux que l’on a choisi étant structurés avec de larges plages musicales, ils se sont facilement emparés de cette proposition, spontanément et dès la première heure de travail. Avec beaucoup de sincérité. J’ai insisté sur l’idée qu’il me semblait important qu’ils fassent « entendre leur voix » et ils ont parfaitement su saisir l'opportunité. Je dois aussi dire que les morceaux ont beaucoup résonné en eux, au point que certains s'interrogeaient à savoir si les auteurs les avaient écrits en prison !

2 / Avez-vous rencontré des difficultés pour tourner les images dans l’établissement ?

C’est la première fois que je tourne en milieu carcérale et il existe tout un tas de contraintes à intégrer au processus de création, qui peuvent être considérées comme des « difficultés ». Il se trouve que les contraintes, quelles qu’elles soient, stimulent la créativité. On ne peut pas faire ça comme ça, alors comment contourner l’interdit ?

Cela donne souvent des résultats inattendus. Et puis, finalement, nous avons tout de même eut accès à des cellules, les couloirs, une bibliothèque en profitant du « briefing », ce moment où tout le monde reste enfermé dans sa cellule. On a eu peu de temps, mais on a su le rentabiliser en ayant préparé en amont ce que nous allions faire.

Il y a eut une grande cohésion de l'équipe, ce qui a permis de faire avec toutes ces contraintes justement.

3/ Quel a été l’apport du travail avec les personnes formées et référentes du Canal vidéo interne ?

Pour les personnes formés, en l’occurence Cedric et Wesley, le fait qu’ils aient plus que des notions de montage et des bases de tournage, donc une certaine culture de l’écriture audiovisuelle, a été très positif.

D’abord parce qu’ils ont tout de suite compris que nous faisions quelque chose de différent et cela les a motivé. Ils ont aussi pu apprendre des choses, sur l’utilisation de la lumière naturelle par exemple et là encore, cela a nourrit leur engagement et les a stimulés aussi à dépasser certains blocages, comme écrire, enregistrer leur voix, car ils ont très vite compris que l’on était en train de faire quelque chose qui allait parler pour eux. Ils ont compris que la poésie, des mots et des images, était aussi une forme d’expression puissante.

Avec Samuel Saint-Martin, le référent culturel, et bien, sans son implication, rien de tout cela ne serait arrivé, tout simplement. C’est un professionnel, mais aussi un homme impliqué dans ces projets de création et qui sait mettre son intelligence au service de son travail. Il a merveilleusement préparé le terrain.

J’ajouterai que, malheureusement pour des question de financement, nous n’avons pas pu faire le montage avec les acteurs du canal vidéo, c’est dommage, car techniquement ils en étaient parfaitement capable, grâce à la formation qui leur a été prodigué et à l’assiduité qui les caractérise.

Mais les intentions étaient si fortes que lorqu'ils ont vu le films(6 ou 7 fois de suite), ils ont vu leur film.

Intérieur : quatorze jours Huit Nuits